La chimie est une science de la nature divisée en plusieurs spécialités, à l'instar de la physique et de la biologie avec lesquelles elle partage des espaces d'investigations communs ou proches.
Selon l'American Chemical Society, la plus grande association de chimistes au monde, la chimie étudie :
La taille des entités chimiques varie des simples atomes ou molécules nanométriques aux édifices moléculaires de plusieurs dizaines de milliers d'atomes dans les macromolécules, l'ADN ou protéines de la matière vivante (infra)micrométrique, jusqu'à des dimensions parfois macroscopiques des cristaux. En incluant l'électron libre composant des réactions radicalaires, les dimensions des principaux domaines d'application se situent globalement entre le femtomètre (10-15 m)[1]et le micromètre (10-6 m).
L'étude du monde à l'échelle moléculaire soumise paradoxalement à des lois singulières, comme le prouvent les récents développements nanotechnologiques, permet de mieux comprendre les détails de notre monde macroscopique. La chimie est qualifiée de « science centrale »[2] en raison des puissants liens qu'elle possède avec la biologie et la physique, ainsi qu'avec la médecine, la pharmacie, l'informatique et la science des matériaux, sans oublier des domaines appliqués tels que le génie des procédés. Si la physique est devenue hégémonique dans le champ de la science de la matière, elle le doit à la considération de l'héritage cohérent des structures atomiques longtemps défendues de façon isolée par des chimistes marginaux avant le XXe siècle.
Étymologie
Le terme chimie nous vient du mot arabe الكيمياء al kemi, c'est-à-dire alchimie, littéralement la kemia, la chimie[3].Al kem signifie en arabe la quantité, la chimie apparait donc comme une approche quantitative de la matière, couvrant indistinctement le champs des réactions proprement dites chimiques comme celui du dosage dans le champ de la pharmacopée.
Khem(et) désigne la terre pour les anciens égyptiens. La chimie est l'art de la terre et le savoir sur la terre. Elle a connu différents essors entre 6000 et 2000 ans avant l'ère chrétienne. Trois étymologies sont fréquemment citées, mais ces hypothèses peuvent être reliées : Certains étymologistes assurent que le mot arabe "kemia", vient du grec χεμεία, "khemeia", qui signifie "magie noire" venant de l'égyptien ancien "kem" qui désigne la couleur noire. Les origines L'art d'employer ou de trier, préparer, purifier, de transformer les substances séchées mises sous forme de poudres, qu'elles proviennent du désert ou de vallées sèches a donné naissance à des codifications savantes. Elles sont d'abord essentiellement minérales. Mais les plantes éphémères et les arbres pérennes du désert, et leurs extraits gommeux ou liquides nécessaires aux onguents, ont été très vite assimilés à celles-ci, par reconnaissance de l'influence des terres et des roches. Outre la connaissance du cycle de l'eau et les transports sédimentaires, la progressive maîtrise des métaux et des terres, les Anciens Egyptiens connaissent le plâtre, le verre, la potasse, les vernis, le papier (papyrus durci à l'amidon), l'encens, une vaste gamme de couleurs minérales ou pigments, de remèdes et de produits cosmétiques... Plus encore que les huiles à onction ou les bains d'eaux ou de boues relaxant ou guérisseurs, la chimie est un savoir sacré qui permet la survie, par exemple par l'art sophistiqué d'embaumer ou par le placement des corps des plus humbles dans un endroit sec. L'art de la terre égyptien a été enseigné en préservant une conception unitaire. Les temples et les administrations religieuses ont préservé et parfois figé le meilleur des savoirs. Le pouvoir politique souverain s'est appuyé sur les mesures physiques, arpentage et hauteur hydraulique des crues, peut-être sur la densité du limon en suspension, pour déterminer l'impôt et sur les matériaux permettant les déplacements ou la mobilité des armées. Le vitalisme ou les cultes agraires et animaux, domaines appliqués de la kemia, ont été préservés dans des temples, à l'instar d'Ammon, conservatoire des fumures azotées et de la chimie ammoniacale antique. Nos repères de pensée taxonomique sont profondément influencés par les civilisations grecques puis hellénistiques, férues de théorisations, qui ont lentement esquissé de façon sommaire ce qui encadre aux yeux profanes la chimie, la physique et la biologie. Elles ont laissé les techniques vulgaires au monde du travail et de l'esclave. L'émergence de spiritualités populaires, annexant l'utile à des cultes hérmétiques, a promu et malaxé ses bribes de savoirs dispersés. Il est d'ailleurs significatif que les premiers textes datés tardivement du Ier siècle et IIe siècle siècle après Jésus-Christ qui nous soient parvenu comportent à l'exemple de l'alchimie médiévale la plus ésotérique, une partie mystique et une partie opératoire[6]. La religiosité hellénistique nous a ainsi légué aussi bien le bain marie, de Marie la Juive que l'abscon patronage d'Hermès Trismégiste, divinité qui prétendait expliquer à la fois le mouvement et la stabilité de toute chose humaine, terrestre ou céleste. Evolution avant l'apparition d'une science mécaniste Au cours des siècles ce savoir empirique oscille entre art sacré et pratique profane. Il s'est préservé comme l'atteste le vocable chimia des scolastiques en 1356, mais savoir et art de faire sont souvent segmentés à l'extrême, parfois amélioré dans le monde paysan, artisan ou minier avant de devenir une science expérimentale, la chimie, au cours des troisième et quatrième décennies du XVIIe siècle. Au même titre que la physique, le prodigieux essor de la pensée et de la modélisation mécanistes, fait naître la chimie sous forme de science expérimentale et descriptive[7]. Riche de promesses, la chimie reste essentiellement qualitative et bute sur le retour incessant des croyances écartées. La chimie a connu un énorme progrès quantitatif avec Antoine Lavoisier qui l'a promue en science exacte. Subsistaient acceptés par les croyances communes jusqu'en 1850, des alchimistes poursuivant la quête de la pierre philosophale continuant l'alchimie sous une forme ésotérique. La rupture entre la chimie et l'alchimie apparaît pourtant clairement en 1722, quand Étienne Geoffroy l'Aîné, médecin et naturaliste français, affirme l'impossibilité de la transmutation. La chimie expérimentale et l'alchimie diffèrent déjà radicalement ; il est donc nécessaire de pouvoir distinguer ces deux termes restés dans le langage. Les biographies des savants français et étrangers sont répertoriées dans les articles catégorie: chimiste ou dans la liste de chimistes. L'étude qualitative de la matière a naturellement conduit les premiers chimistes des années 1620-1650 à modéliser sa composition, puisant librement, mais non sans méfiance dans une abondante tradition antique. A la suite de Van Helmont, ces adeptes mécanistes de la contingence maîtrisent déjà la notion de gaz, tiennent compte du facteur de la température et parviennent à expliquer sommairement la pression de vapeur d'un corps et les mélanges miscibles des fluides. John Dalton, persévérant expérimentateur, continuateur de la première lignée mécaniste partiellement abandonnée, a le premier essayé de donner une définition moderne de la notion d'atome. L'atome est une particule fondamentale ou une combinaison de plusieurs d'entre elles. En 1811, Amedeo Avogadro affirme que le volume d'un gaz quelconque à pression et température constante contient le même nombre de particules, qu'ils dénomment molécules intégrantes ou constituantes[8]. Mais il a encore fallu l'obstination de nombreux chimistes souvent incompris, Jons-Jakob Berzelius en pionnier de l'électrovalence dès 1812, pour réaffirmer la possibilité d'une modélisation à la fois mécaniste et géométrique par le biais d'une architecture atomique. Un Auguste Laurent, proposant pour des séries homologues de molécules organiques un même squelette constitué d'atomes, était atrocement dénigré par les maîtres des laboratoires[9]. Mais malgré la suprématie et l'influence politique des équivalentistes, le revirement s'opère, porté par la reconnaissance des vieux succès de l'électrochimie préparative depuis Humphrey Davy et Michael Faraday et la volonté de corréler quantitativement nombre d'espèces chimiques et masse d'un corps pur. Des années 1930 à notre XXIe siècle, la mécanique quantique explique le comportement de l'atome et des molécules .Méthodes physiques d'identification de composés chimiques au XXe siècle
Les représentations de l'atome et de la molécule
Au vingtième siècle, l'essor des mesures physiques a facilité aux chimistes la caractérisation des composés avec lesquels ils travaillent. Avant la réaction chimique et un nombre restreint de techniques physico-chimiques s'imposaient en ultime recours pour détecter ou caractériser une molécule. Maintenant les diverses méthodes de chromatographie, de spectrométrie électromagnétique (infrarouge, lumière visible ou UV), de masse, de résonance magnétique nucléaire, les microscopies électroniques et autres analyses par diffraction de rayons X ou par diffusion de particules, et dans des cas d'observation contrôlée sur surface plane, la microscopie par champ de force ont permis une identification plus aisée, et souvent de remonter à la structure géométrique des molécules et de leurs assemblages, de connaître leur composition isotopique et parfois même de "voir" par le multiplicateur instrumental la molécule, de la (dé)placer ou de suivre des réactions (photo)chimiques en temps réel de plus en plus bref. Ces progrès physico-chimiques ont permis des avancées énormes tout particulièrement en biochimie où les édifices étudiés sont complexes et les réactions variées.
Il existe d'autres domaines spécialisés ou d'interface :
Ces interfaces mouvantes ne facilitent pas la délimitation de la chimie. Tentons d'esquisser ses frontières.
L'évolution de la chimie, tant dans son enseignement que dans les champs de recherche, est influencée à terme par les puissantes directions de recherches américaines, en particulier de façon récente privilégiant majoritairement les domaines des soins et de la santé humaine et animale.
La langue de la chimie est majoritairement l'anglais. Dès années 1880 à la Grande Guerre, l'allemand, l'anglais et le français ont pourtant été des langues véhiculaires nécessaires aux savants. Mais survient l'éclipse du français dans l'entre-deux-guerre[13]. Puis l'allemand qui avait réussi à préserver quelques dernières revues importantes ou écrits scientifiques de référence a cédé face à la puissante organisation planétaire anglo-saxonne dans les années 1990.Polymères
Article détaillé : polymère.
Les polymères sont des grandes molécules ou macromolécules dont un grand nombre des plus communs est formé par la réaction en chaine de petites molécules appelées monomères. Ces polymères de synthèse industriels, dont la structure est fondée sur la réplication d'un motif organique de base peuvent être linéaires, ramifiés ou greffés, en réseau ou interpénétrés... Dans le cas de polymères formés par polyaddition de monomères organiques dont le site réactif est justement la double liaison carbone-carbone, le grand squelette plus ou moins souple formé d'atomes de carbone qui est décrit par ses configurations et longueur(s) de chaine moyenne(s) influence les propriétés observées. Citons parmi ces polymères organiques, les polyéthylènes, les polypropylènes, les polystyrènes, les polyisoprènes, les polybutadiènes, les PVC, les polyacryliques... Il existe d'autres sortes de réactions de polymérisations, comme les polycondensations à l'origine des polyesters, polyamides, polycarbonates, polyuréthanes. Il existe aussi des polymères à motifs minéraux, comme les silicones ou les polysufures.
Comme le pionnier Hermann Staudinger le pressentait en 1910, il existe des macromolécules ou polymères naturels, par exemple à base-motif de glucose ou sucre chimique comme la cellulose ou l'amidon, à base-motif d'acides aminés comme les protéines et ADN. La chimie macromoléculaire née dans les années trente a été un domaine continument innovateur, même au cours des dernières décennies.
Solution et émulsion Une solution est un mélange homogène formé par un solvant en proportion majoritaire et d'un ou plusieurs solutés dans une phase homogène. La solubilité est la capacité d'un corps à entrer en solution dans un milieu donné. Par exemple un sel cristallin comme le chlorure de sodium NaCl ou sel de cuisine possède une limite de solubilité dans l'eau : 357 g/kg d'eau à 0°C et 391 à 100°C. Cela signifie qu'à partir de cette teneur limite, il y a séparation de phase parce que le sel précipite ou se dépose sous forme solide. La miscibilité est la capacité d'un corps de se mélanger avec un autre en formant une seule phase. Le gaz ammoniac NH3 se mélange facilement à température ambiante avec l'eau liquide formant l'ammoniaque, 1 kg d'eau froide saturée d'ammoniac peut contenir 899 g de NH3. Les gaz principaux de l'air oxygène et azote sont aussi miscibles en certaines proportions dans l'eau liquide. 100 g d'eau liquide à 0°C peut contenir au maximum 4,89 cm³ du premier en solution et 2,3 cm³ du second. Une émulsion est un milieu polyphasique, c'est-à-dire comportant plusieurs phases dont au moins deux phases liquides non miscibles, l'une étant finement dispersée dans l'autre phase liquide majoritaire et continue. Pour qu'une émulsion soit stable, il faut que les fines gouttelettes en suspension soient stabilisées par des molécules amphiphiles qui se placent à l'interphase, c'est généralement le cas pour les suspensions colloïdales. L'art de fabriquer des émulsions a fourni des applications en pharmaceutique comme en cuisine, par exemple pour la préparation de sauces ou de mayonnaises. Le lait est une émulsion nutritive d'une phase huile dans l'eau.
Industrie Article détaillé : Industrie chimique.