La délocalisation économique est le transfert d'activités, de capitaux et d'emplois en des régions du pays ou du monde bénéficiant d'un avantage compétitif du fait :
La délocalisation, et son opposée la relocalisation, sont des sujets de la notion plus générale du choix de localisation des activités productives de biens et services. Ces choix se font en fonction de l'attractivité des territoires et sont du domaine de la géographie économique.
Définition du concept
La délocalisation consiste dans l'abandon d’une activité de production nationale, le transfert de cette activité vers une unité de production à l’étranger et l'importation de la partie de la production réalisée à l’étranger destinée au marché national ou local.
Le rapport du Sénat Délocalisations : pour un néo-colbertisme européen[1] de l'homme politique Francis Grignon propose la définition suivante.
« Définir les délocalisations soulève de grandes difficultés tant cette notion est polymorphe. A une notion relativement circonscrite s'est substituée aujourd'hui, dans le débat public, une acception beaucoup plus étendue qui en dénature parfois la compréhension. Or, la recherche de solutions efficaces aux difficultés sociales et territoriales qu'elle soulève rend nécessaire que le diagnostic soit fondé sur une analyse claire, exempte d'approximations... La définition des économistes. Au sens le plus strict, la délocalisation consiste à changer de lieu une unité de production : on désigne alors par ce substantif l'ouverture d'une unité productive à l'étranger, concomitante à la fermeture d'une unité locale, sans que soit affectée la destination des biens produits : marché domestique, ce qui implique alors un flux nouveau d'importations, ou marchés étrangers, ce qui diminue les flux d'exportation... Dans une deuxième acception, dérivée de la première, la délocalisation désigne le recours à la sous-traitance proposée par une société étrangère afin de fournir des biens auparavant produits localement. Dans ce cas encore, que l'anglais désigne sous le terme d'« outsourcing » ou de « sourcing », les biens produits à l'étranger sont réimportés sur le marché d'origine où ils ont vocation à être commercialisés, comme substitution aux biens auparavant produits localement... Enfin, certains qualifient aussi de délocalisation la création d'une nouvelle unité de production à l'étranger plutôt que sur le territoire national, sans réduction de l'activité domestique. La situation est dans ce cas plus complexe, selon qu'on considère que l'augmentation des capacités de production aurait pu être assurée localement ou non, pour différentes raisons tenant à la situation géographique des marchés concernés, aux coûts de transports, aux droits de douane ou à diverses contraintes non tarifaires. Dans le premier cas, en effet, l'extension sémantique est encore envisageable puisqu'on peut admettre que la décision d'investissement résulte bien d'une analyse d'opportunité entre territoires, national et étranger, et que le choix de la seconde branche de l'alternative « prive » l'économie domestique d'une capacité productive supplémentaire... Trois significations du mot « délocalisation » désignent donc une forme de substitution de la force productive étrangère à celle nationale, qui ont pour caractéristique commune d'avoir théoriquement une incidence négative directe sur l'emploi national. En effet, l'entreprise arrête de produire dans un pays donné, ou s'abstient d'y augmenter ses capacités de production, afin de fabriquer ou de faire fabriquer dans un autre pays sous forme d'investissement direct ou de sous-traitance. »
— Francis Grignon, Délocalisations : pour un néo-colbertisme européen. Rapport d'information du Sénat Français n° 374 (2003-2004) fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 23 juin 2004, § 3 [2]
Pays et secteurs concernés
Les délocalisations concernent deux types de pays :
Toutefois, la réalité est plus complexe, et l'on voit aussi des pays industrialisés bénéficier des délocalisations. Par exemple, en France avec l'implantation de l'usine Toyota à Valenciennes.
Aux États-Unis, les travaux et de Jagdish Bhagwati[3] (et al) ont souligné que les délocalisations avaient peu de chance de menacer l’emploi.
En France un rapport du Conseil d'analyse économique daté de la même année (Jean-Hervé Lorenzi et Lionel Fontagne, Désindustrialisation et délocalisations) arrive à des conclusions semblables.
Il faut toutefois remarquer que les secteurs d’activités concernés par les délocalisations sont de plus en plus nombreux comme l’atteste celle récente de certains services.
La délocalisation des services est liée à la disponibilité d’importantes infrastructures de communication, conséquence du développement des télécommunications et d’Internet à la fin des années 1990. Suite à l’informatisation de nombreux services, il a été possible de déplacer le lieu de production des services vers des pays à bas salaires sans que cela n’affecte le client.
L’Inde est la première bénéficiaire de cette tendance car elle dispose d’une importante main-d’œuvre qualifiée et anglophone. Des services d’assistance technique sont par exemples fournis aux clients américains sans que ceux-ci ne connaissent la nationalité de leur interlocuteur. Le développement de l’industrie informatique en Inde, dans la ville de Bangalore par exemple, a été accéléré par l’implantation des grandes entreprises américaines. En France, des sociétés telles que Axa ou la Société générale ont délocalisé leur comptabilité en Inde, British Airways et Swissair leurs activités de réservation…
L'industrie automobile, l'électroménager, la téléphonie, les entreprises de sous-traitances (injection plastique, assemblage,...) sont également très touchées par les délocalisations. La politique achat de certains grands donneurs d'ordres obligent leurs sous-traitants à les accompagner dans leur implantation en pays Low Cost (pays à bas coût de main d'oeuvre : pays de l'Europe de l'Est, Afrique du Nord, Inde, Chine, Mexique,...).
Causes
Les causes peuvent être schématiquement résumées autour de deux grandes problématiques : produire moins cher et vendre sur le marché local.
Produire moins cher
Notamment pour améliorer la marge (le résultat, les bénéfices) de ses produits (lors d'une délocalisation partielle de sa production) ou pour améliorer le résultat final de son entreprise ou d'un de ses sites de production (lors d'une délocalisation totale). Certaines entreprises en feront bénéficier leurs clients, d'autres préfèreront ne pas faire de baisse de prix (exemple : Salomon a fermé ses sites de production français et réalise 100% de ses chaussures de ski en Roumanie en les sous-traitant chez le plasturgiste roumain Plastor, mais les prix de vente ne sont pas moins élevés que lorsque celles-ci étaient fabriquées en France). L'un des enjeux est aussi de pouvoir proposer des prix compétitifs par rapport à la concurrence grandissante des produits asiatiques et indiens : jouets, montres, textiles, produits intégrant des fonctions électroniques,... et bientôt automobile (ex: Tatamotors).
Vendre sur le marché local
Lorsque le marché d'origine est saturé, il est intéressant pour une entreprise d'essayer de vendre ses produits dans les pays émergents (autre terme utilisé pour les pays Low Cost).
Ce fut le cas lorsque Renault a créé une nouvelle unité de production en Roumanie pour fabriquer la Dacia Logan. En effet, au départ, il n’était pas prévu de la commercialiser dans les pays d’Europe de l’Ouest. Dans ce cas, on parle de localisation et non de délocalisation. Ceci est également vrai lorsqu’une entreprise s’implante dans un nouveau pays pour produire un nouveau bien.
Pour l'économiste Edouard Barreiro une stratégie de localisation peut se transformer en délocalisation, lorsque les unités de production prévues pour alimenter des marchés locaux, prennent en charge des produits destinés à d’autres zones géographiques. Outre le prix de la main d’œuvre cette stratégie s’explique par le fait que les infrastructures localisées dans les pays émergents sont plus récentes et donc plus performantes que celles disponibles en Europe de l’Ouest. Dès lors, « Il devient rationnel de déplacer les productions les moins rentables vers ces dernières »[5]. Par conséquent, progressivement, des segments entiers du marché automobile pourraient être délocalisés, « seules les activités à haute valeur ajoutée, comme la R&D, le design ou encore la production de véhicules très haut de gamme, demandant une main d'œuvre très qualifiée, seraient maintenues dans les pays d'Europe de l'Ouest »[5].
Conséquences
Si les conséquences négatives sur les pays subissant les délocalisations sont souvent mises en avant, on en oublie les conséquences positives sur les pays qui bénéficient de ces délocalisations. C'est pourquoi, une compréhension complète de la problématique des délocalisations, exige de voir ce phénomène des deux points de vue.