Industrie [modifier]
L'industrie chimique se développe continûment à la fin du siècle des Lumières. Si la métallurgie n'est pas oubliée, le progrès est partout observable. Le fer blanc devient un produit commun entre 1770 et 1780. Puis après 1780, outre les métaux, elle mêle des fabrications millénaires à des innovations récentes : les acides et la soude, l'ammoniac, le chlore et les chlorures décolorants, le phosphore et ses dérivés, les savons et acides gras, l'hydrogène, l'éther, l'éthylène, l'alcool de vin, l'acide acétique et surtout de nombreux sels et une multitude de dérivés organiques et minéraux préparés ou recueillis dans un cadre traditionnel.
Elle prend un essor prodigieux au XIXe siècle et participe pleinement aux fortes mutations de la révolution industrielle[19]. Le gaz d'éclairage, produit de la distillation de la houille ou charbon gras, lance l'immense développement de la carbochimie. La découverte de métaux, leurs préparations au laboratoire, puis au stade industriel, ainsi en-est-il de l'aluminium et des métaux alcalins et alcalino-terreux, témoignent de la vigueur de la science très proche de l'industrie.
En 1900, usines et laboratoires fabriquent déjà dans le monde plus de 100 000 composés, mettant en œuvre des centaines de réactions chimiques types. Chercheurs et institutions savantes décrivent et référencent procédés, réactions et molécules[20].
L'industrie chimique représente une part importante de l'activité économique des grands pays industriels au XXe siècle. Dans les années 1970, elle intéresse au sens large la moitié du capital industriel mondial. La variété des matériels et des technologies qu'elle utilise est incroyablement vaste, comme l'indique une visite au pas de course des exposants pendant les jours de l'Achema à Francfort.
Parmi les activités chimiques, retenons les secteurs suivants :
Cette industrie peut se scinder en deux grands types : L'ampleur de la production chimique caractérise la chimie lourde ou bulk chemistry avec ses procédés automatisés et ses énormes masses traitées ou extraites. La chimie fine se limite à des quantités restreintes de composés, souvent à haute valeur ajoutée pour la pharmacie, la parfumerie et la cosmétique ainsi que dans de nombreux domaines ciblés de haute technologie. Recherche [modifier] Si les approches supposées définir la chimie dans les différentes parties de cet article semblent bizarres à un chimiste - et en effet, avec la forte imprégnation d'une vision scolastique s'y esquisse l'épistémologie, l'histoire, la didactique, l'enseignement, les rapports au grand public... à défaut d'une sociologie apparente de la science chimique, bref, tout sauf de la chimie - induisant des images avortées aux yeux du spécialiste, c'est que la chimie n'existe véritablement que dans le flux de la recherche. Cette science s'actualise, au jour le jour et depuis plusieurs siècles, par la manipulation à la paillasse ou avec l'instrumentation la plus sophistiquée, affine ses modèles mois après mois, laissant des résultats qui, années après années, modifient insensiblement et irréversiblement les pensées sur la matière. Et ce champ se construit sur des thèmes choisis, imposés ou dérivés au point qu'un constat humoristique en partie extérieur, par exemple celui du physicien Pierre-Gilles de Gennes, pouvaient la qualifier d'une fabuleuse réunion d'auberges espagnoles. Lieu de vie et de labeur hiérarchisé et segmenté, le laboratoire laisse entrer de nombreux thèmes imposés par la société. En premier lieu, en quête de budgets pour sa subsistance économique, il laisse venir les besoins et les impératifs de l'industrie, marquant dans le meilleur des cas ses résultats par des prises de brevets conjointes avec le donneur d'ordre. Ne rejetant pas les références institutionnelles pour sa nécessaire existence publique ou médiatique, il est flatté des demandes officielles et sa reconnaissance dans les domaines de l'expertise, de l'encadrement et de la formation couronne son existence. Mais pour les meilleurs chercheurs au sein des organisations efficacement gérées ou privilégiées, les thèmes dérivés s'imposent, car compréhension des découvertes et course à l'invention les font entrer dans une captivante émulation si l'ardeur reste scientifique ou une féroce concurrence si elle se mâtine de gains économiques ou de monopoles, souvent pédagogiques ou d'expertise, par le soutien politique. Il reste enfin une minorité de chercheurs, de l'ordre de quelques centièmes, plus ou moins écoutés selon les moments, défendant les thèmes fondamentaux et définissant par leurs écrits et conférences, les acquis et les applications de leurs disciplines. Ces chercheurs puristes ou engagés s'acharnent à poursuivre l'enquête scientifique au sens noble, soucieux de description, de fiabilité des mesures, de réitération et de recherches complémentaires sur des sujets moins à la mode, mais selon eux fondamentaux[21]. Ils comptent parmi eux les modestes opérateurs collectifs de la gigantesque maîtrise d'œuvre collective qu'est la science, les défenseurs d'une éthique, les piliers et dirigeants des comités de revues ou des associations, les réformateurs ou microadaptateurs de la nomenclature en vigueur. Même dans la description de la chimie la plus authentique, l'écueil d'un aperçu sociologique ne peut être évité que par l'anecdote et l'histoire d'abord personnelle d'une recherche. Ainsi ce chimiste du Middle West américain définissant la naissance de sa recherche en chimie organique comme le fruit né de la contemplation puis de l'observation raisonnée des feuilles mortes de sa ville. C'est ce simple déchet végétal collecté, puis transformé en compost, par dégradation microbienne et action des levures et champignons, puis recyclé en terre dans les jardins ou autres lieux d'épandage, qui est à l'origine de sa vocation. La chimie ici ne peut se dissocier de la formidable action chimique du vivant et, tôt ou tard remise dans une large perspective évolutive prenant en compte les paramètres physico-chimiques, des multiples "inventions" du vivant sous toutes les latitudes et dans tous les milieux. Tant il est vrai que l'étude précise d'une petite fraction d'un cycle terrestre débouche sur l'attrait d'en savoir plus et de poursuivre l'enquête. D'une manière analogue, on ne peut comprendre les débats de la chimie stellaire que par l'attrait initial des composants intimes des atomes et molécules induisant une course à leur origine. Prix [modifier] La chimie est à l'œuvre partout dans la nature, les corps vivants, les choses de la vie quotidienne sans que l'observateur attentif et disposant de puissants multiplicateurs sensoriels ne puisse correctement l'imaginer ou le modéliser. Un chimiste est dès l'origine un expert des bilans matière et énergie et il sait intuitivement qu'il devrait prendre en compte tous les milieux et les acteurs microbiologiques, végétaux, animaux et humains. Lui en laisse-t-on les moyens ? Citons quelques applications. D'abord la mesure. L'analyse précise de solutions diluées dans un solvant, contenant des molécules solubles plus ou moins complexes, est le fruit de longues mises au point analytiques, aujourd'hui très vite réalisées et banales, comme en chimie des solutions aqueuses. Pensons aux analyses banalisées de l'eau de notre robinet reconnue potable ou des eaux minérales du commerce. Les (bio)chimistes spécialistes des eaux ont un rôle de surveillance des eaux naturelles et de leurs qualités ou toxicités éventuelles. Si les progrès substantiels avaient été réalisés, le recours à la désinfection chimique de l'eau du robinet avant consommation pourrait être modérer. En fin d'usage, la maîtrise des procédés chimiques et biologiques permet le traitement des eaux usées dans les stations d'épuration. Ensuite l'usage. La chimie la plus simple peut commencer avec la fabrication et l'usage du sel, nécessaire à l'alimentation et capital pour les vieux procédés de longues conservation des aliments. Aujourd'hui les produits de l'industrie agro-alimentaire ont recours à une gamme plus variée de conservateurs, agents de conservation ou agents nutritif, additifs alimentaires comme les colorants, les arômes artificiels, les édulcorants...
Des emballages alimentaires à la préservation des récoltes, une connaissance raisonnée des matériaux et des aliments permet d'éviter le gaspillage et les déperditions tout en préservant la qualité et propriétés nutritionnelles des futurs aliments. Suivant l'usage, les emballages peuvent être biodégradables et, à l'aide du tri sélectif après utilisation, ils sont transformés et revalorisés grâce à des procédés chimiques de recyclage ou une combustion ultime qui permet de ne pas gaspiller l'énergie qu'ils recellent. L'agriculture a subi une mutation technologique et elle est devenue fortement dépendante d'intrants chimiques. Il est certain que l'utilisation à grande échelle d'engrais chimiques, l'usage irraisonné de pesticides et d'insecticides dans des monocultures de plus en plus sensibles ou fragiles peuvent être une impasse désastreuse à long terme pour les sols, l'écologie des terres et la santé des animaux et des hommes qui y vivent ou vivront, ainsi que les tenants de l'agriculture biologique le postulent dans l'immédiat. Si on donne à un homme un couteau, il peut découper finement un jambon de façon à le partager avec ses amis, ou encore égorger sauvagement ses voisins perçus en ennemis. L'utilisation des technologies chimiques recèle des bienfaits potentiels ou de terribles dangers selon les usages ou les buts visés. Elle échappe autant aux chimistes qu'à l'honnête homme de la rue. Par exemple, un chimiste organicien considère comme une absurdité de brûler de l'essence dans un moteur à combustion, car pour lui cette matière de choix permet de réaliser d'autres molécules chimiques à usage variés qui, alors seulement au terme de leur usage, pourraient être décomposer et brûler. Le gain sur une courte échelle de temps d'une famille de produits chimiques, parfois peu sophistiqués et à utilisation massive, permet d'obtenir des profits évidents. Ainsi s'obtiennent des récoltes plus abondantes en enrichissant les sols pauvres et en éliminant les insectes nuisibles, les champignons parasites, les mauvaises herbes et la faune associée. Mais qu'en est-il à longue durée ? Après l'éradication de multiples espèces d'oiseaux, l'affaiblissement des hyménoptères butineurs, n'est-il pas temps d'une prise de conscience générale des dommages causés à l'environnement ? Les sociétés agrochimiques produisent alors de nouveaux produits plus efficaces ou plus ciblés qui peuvent soit respecter mieux l'environnement soit entraîner d'autres catastrophes parfois plus pernicieuses alors que la course au profit immédiat implique de minorer toute information alarmiste. La chimie explique sommairement la formation du bois et des textiles naturels ou permet la synthèse de larges gammes de de matières et de types de matériaux : textile synthétique (nylon, lycra, fibre PVC dite polaire, mobilier en matière plastique, etc. Dans le domaine de la construction, la chimie a beaucoup évolué en contribuant aussi à la fabrication de matériaux, d'isolants performants, de peintures ou de vernis, de mastics, de produits d'entretien et d'ameublement. Les désagréments causés par les produits des premières générations ont été très lentement corrigés, puis les générations suivantes apportent d'autres inconvénients. Un nombre important d'applications chimiques ont trouvé ou trouvent encore des débouchés et usages commerciaux profitables, alors qu'une connaissance approfondie et précise des méfaits de leurs emplois ou mésusages fait défaut tant aux utilisateurs qu'au public. La chimie toxicologique est une parente pauvre et alors que les grands groupes pétrochimiques se sont vantés dans les années 1970 d'apporter une sécurité écologique, les 200 000 molécules que leurs activités ont permis de confectionner ne sont véritablement connue du toxicologue qu'à 1%. Le progrès n'est plus visible depuis longtemps, c'est un chamboulement, un gain éhonté pour certains, une menace vitale pour les moins favorisés, mais comment essayer de maîtriser et de juguler le danger sans faire confiance à la collégialité de différents chimistes, renforcées au besoin d'équipes expertes de mathématiciens, physiciens, de biologistes... et à leurs éthiques de vérité scientifique ? Santé et environnement [modifier] La découverte et la synthèse de médicaments qui contribue à l'augmentation de l'espérance de vie enregistrée depuis la fin de la révolution industrielle dans les pays développés sont aussi à l'actif des techniques de la chimie. Mais la médicalisation massive d'une population entraîne d'irréductibles problèmes de pollutions, car les molécules ou leur produits sommaires de dégradations se retrouvent dans les eaux usées. Dans le domaine « Santé-Environnement », la chimie constitue une source de problème via certains polluants qu'elle crée ou contribue à diffuser dans l'environnement, en particulier les produits chimiques toxiques ou écotoxiques dont les CMR « cancérigènes, mutagènes, reprotoxiques ». Certains produits tels que médicaments, pesticides, catalyseurs.. ou leurs résidus perdus dans l'environnement ou présents dans l'alimentation peuvent ensuite poser des problèmes d'environnement ou de santé, en particulier avec les perturbateurs endocriniens). Les substances chimiques seraient "au premier rang des accusés" de la chute de la qualité des spermatozoïdes (réduite de 50% depuis 1950) et des maladies liées à l'appareil génital à travers les perturbateurs endocriniens. Le 25 novembre, le gouvernement français (à travers l'Iresp, structure de recherche créée par l'Inserm et 20 partenaires) et l'Afsset) a organisé un colloque sur ce thème: "Environnement chimique, reproduction et développement de l'enfant." Les principales matières incriminées sont les phtalates et le bisphénol A[22], deux additifs présents dans les matières plastiques.
Un monde de la recherche [modifier]
De la chimie en bien et en mal [modifier]